On nous dit aujourd'hui sur Canal + (et ils ne sont pas les premiers) que l'Alsace grince des dents à la vue de Jean Marie Bockel accédant au gouvernement. Les Guignols parlent d'un député de Moselle. Et pourquoi pas en Allemagne tant qu'on y est ? Ils ne seraient pas les seuls à se planter. Je ne suis pas de cette Alsace. Et je ne suis pas d'accord. Et tant pis pour Arlette que l'on voit dans tous les journaux et qui tire la tronche. Je suis heureuse pour lui, heureuse qu'on ait su reconnaître ses qualités et qu'on lui ait proposé des responsabilités, heureuse qu'il ait su voir en cette proposition une possibilité de faire avancer les choses et non une potentielle trahison. Je crois qu'il n'y a plus rien à trahir. Le PS se trahit tout seul (et je porte pourtant toujours ses idées dans le coeur), il n'a pas besoin qu'on le quitte, ou qu'on "pactise avec l'ennemi". Ségolène, elle-même, ne sait plus ce qu'elle dit ou ce qu'elle a pu dire : "1500 euros brut, mais je n'ai pas dit ça, ce n'est pas possible, je n'y ai jamais cru". Comment avoir encore envie de se battre au sein d'un parti qui semble prêt pour mener bataille contre lui-même. Il ne s'agit pas de se tirer dans les pattes, de critiquer un tel ou son voisin, ou son conjoint, ou mieux encore son ex-conjoint, pour telle ou telle raison. Il ne s'agit même pas de tirer dans les pattes de celui qui est maintenant président d'ailleurs. Il s'agit avant tout de faire avancer les choses, quel que soit le parti, quelle que soit la personne, pourvu qu'il y ait les idées. Navrée si mon discours ce soir a un petit goût de "modem", ce n'était pas forcément le but.
J'ai vécu huit ans à Mulhouse. Les premières années là-bas ont été difficiles : étudiante alors, j'y ai découvert la rudesse de la vie, la vraie valeur de l'argent, la solitude parfois, mais surtout une ville, ses habitants, si différents les uns des autres, hostiles à première vue et finalement si généreux. Mulhouse était alors triste et morne, sa Tour de l'Europe faisait grise mine au coeur d'un centre qu'on désertait et qu'on disait même dangereux, les sorties se faisaient rares, faute d'argent, faute d'envie. Puis au fil du temps, le coeur s'est attaché aux ruelles, à ce que proposait la municipalité, au programme culturel et social. Je me suis fait une place dans cette cité qui m'a liée à elle. Puis je l'ai quitté, en devenant adulte. Études achevées, job dans une autre ville. Aujourd'hui, la ville que j'ai laissée est belle, transformée par l'arrivée d'un tramway, agréable disent même ceux qui y vivent encore. Et le hasard m'a trouvé un poste là-bas en septembre dernier, ce qui me mène dans ses quartiers plusieurs fois la semaine. Alors j'ai toujours eu du respect pour Jean-Marie Bockel. Je ne dis pas qu'il a été seul, je ne dis pas qu'il est parfait (j'ai entendu récemment parler, par exemple, de la suppression des subventions aux postes d'enseignement du FLE à Mulhouse), et encore moins magicien. Je dis simplement qu'aujourd'hui, il a eu raison de préférer l'efficacité (ça reste bien sur à mettre en pratique) à une espèce de fraternité terne qui sonne faux.
J'ai vécu pendant huit ans dans la deuxième maison en partant de la gauche.
Encore maintenant, lorsque je passe sous ces fenêtres,
je lève le nez, nostalgique,
pour voir s'il y a de la lumière derrière les carreaux.