Petit sac en cuir.
Il y a ces jours où on se sent vieille, et les charme du passé ne font plus leur effet. Ce qui avait tant plu a perdu de son efficacité. J'ai tant aimé étant plus jeune les vadrouilles en festivals, la musique qui se répercute dans la nature et dans la poitrine, les festivaliers crottés qui errent, une merguez, une bière, ou un pétard à la main, ces rencontres, ces surprises, ces nuits qui n'en finissent plus. J'aime moins aujourd'hui. Souvent fatiguée, souvent moins curieuse.
Alors quand on m'a offert ces deux places pour les Artefacts à Strasbourg pour mon anniversaire, j'ai souris. Un peu de nostalgie, un peu d'appréhension. Pas vraiment envie. Puis après une semaine impensable (David contre Goliath, David a gagné mais il était crevé), il me fallait trouver le courage d'aller errer dans le froid de ce festival qui se veut printanier. La fatigue me démotivait, même plus cette curiosité que j'avais encore l'an dernier. Pourtant, nous avons pris la route en début d'après-midi pour découvrir le nouveau lieu : le zénith de Strasbourg , une espèce d'énorme tuyau orange hideux. Sur le parking, j'ai ouvert mon petit sac en cuir et j'y ai fourré toute ma mauvaise humeur, ma fatigue et ma mauvaise foi.
Puis la découverte. A l'intérieur, le tuyau moche était très chaleureux. Nous sommes entrés dans une immense salle pleine de douceur et de convivialité. Nous sommes arrivés au milieu du concert d'Aaron, une espèce de Chris Martin français qui chante en anglais, des airs mélancoliques et de belles mélodies, une voix un peu magique accompagnée d'un violoncelle, des rythmes surprenants. Tout de suite sous le charme.
Il a été l'heure des premières bières, du goût doré qui coule dans les gosier et qui réchauffe les jours d'avril froids.
Plus tard, Renan Luce que j'attendais pourtant m'a déçue. Mon coup de coeur s'est évanoui. Il est arrivé avec une tête de zombie, des valises sous les yeux comme pour un départ au bout du monde ou un retour de gastro. Sa guitare semblait ramomo et malgré l'aide d'Europe 2 (Oh pardon, Virgin radio !) qui passe en boucle ses morceaux depuis des semaines, il n'a pas su mettre le feu au public venu tôt et nombreux pour le voir.
Puis merveilleux Dionysos, tout droit sorti d'un film de Tim Burton ou d'un asile psychiatrique. Il n'y a que sur scène que l'on peut être fou sans risquer de se faire enfermer. Personnage magique et bondissant qui nous a fait la surprise de venir accompagné de sa jolie Olivia et de ses airs de poupée. J'ai fait des sauts sur place pendant toute la durée du concert, sans trop savoir d'où provenait cette énergie insoupçonnée.
Nous avons zappé Grand Corps Malade, qui ne nous inspirait vraiment pas, et nous nous sommes dit que c'était sans doute le bon moment pour aller se chercher un petit truc à manger. Tout le Zenith avait eu la même idée et nous nous sommes retrouvés dans des files d'attente de plus d'une demi-heure pour les kebabs les plus dégoutants, les plus petits et les plus chers jamais mangés.
C'est avec les doigts puant les oignons et la faim au ventre (mais plus de sous ni de patience) que nous sommes allés savourer Cali. Une fin de toute beauté. Une sincérité et une chaleur pour cet homme qui transcende ses textes sur scène. Qu'il a été doux de se laisser porter par la force de ses mots, par son énergie brute.
Retour à la maison sans aucun regret. Le petit sac en cuir était vide au retour. Le contenu s'était évaporé.