Rêve O.
Ma journée d'hier, dernière de la
semaine fut la plus longue. Presque douze heures en non-stop. Pas de
vraie pause déjeuner, un quart d'heure pour bâfrer un mini sandwich
avec le téléphone collé sur la joue et ma soeur qui me vante les
qualités de son nouvel appart futur (un quart d'heure au téléphone, pas
une seule question me concernant, si ce n'est "ah, tu manges...", oui,
je répondais la bouche pleine). Des heures de cours qui se sont
enfilées les unes aux autres. Rendez-vous avec le directeur dans
l'après-m' qui prendra peut-être en charge ma mention complémentaire.
Puis je monte dans ma voiture pour le premier cours particulier de
l'année. A une trentaine de bornes de C., dans une famille pour
laquelle j'ai travaillé il y a deux ans. Le grand frère a eu son bac,
il faut maintenant coacher la petite soeur. Je la découvre, gauche,
bien moins dégourdie que l'ainé, timide, avec les réflexes d' une
gamine de cinq ans qui se cacherait dans les jupes de sa mère. Elle en
a pourtant dix-sept. Le niveau n'est pas mauvais, mais elle manque
cruellement de confiance en elle, il y du travail. Les deux heures
filent très vite. Retour vers dix-neuf heures, sous une pluie battante,
un ciel noir et déchaîné, chauffage dans la voiture car j'ai la tenue
d'un été indien et Keane bien fort pour faire vibrer l'habitacle. Je
m'endors sur la canapé quelques minutes après mon arrivée chez moi.
Je
me réveille ce matin, après douze heures de sommeil. Des rêves trop
mouvementés qui vont me poursuivre une bonne partie de la journée. Je
me souviens avoir croisé hier en un éclair dans les couloirs du lycée
un jeune homme qui e eu son examen en juin dernier, que j'avais suivi
pendant deux ans. J'ai vu son visage me sourire. Il semble que ce soit
la seule chose que mon cerveau ait retenu de cette longue journée
puisque le jeune homme en question (ses yeux clairs et son sourire) m'a
suivi toute la nuit dans des rêves tientés de guerre, de mort et de
fuite. Je revois les images de ces bombes qui tombent du ciel pour
venir exploser en pluie de cailloux au-dessus de nos têtes. Je revois
sa main dans la mienne pour courir vite et loin. Mais où ma tête
va-t-elle chercher tout ça ?